dimanche 13 janvier 2008

LA TETE ET LES JAMBES

Les écrans de télévision "non seulement sont remplis de sarkozysme, mais ils dégoulinent de sarkozysme » - Laurent Fabius, Ripostes – 06/01/2008


La télévision, appareil de pouvoir au service du Président … Cette bonne vieille litanie des temps anciens a de quoi réjouir quand elle est resservie par l’ancien Premier ministre Laurent Fabius, lui qui a dès son plus jeune âge, entretenu des rapports simples et directs avec les dirigeants des chaînes publiques. Je ne parle pas de sa remarquable prestation équestre dans le cadre du jeu La tête et les jambes. Je fais plutôt référence à son cavalier « Parlons France », quart d’heure d’antenne mensuel imposée à la chaîne publique TF1 dès octobre 1984. Un numéro de voltige bien rodé pour expliquer sa politique : après tout, TF1, c’est l’Etat, et nous parlons du Premier ministre de la France, donc pourquoi ne pas utiliser la fréquence publique pour s’inviter dans les foyers. Il avait d’ailleurs peu de temps auparavant délivré son oukase à la Haute Autorité de l’audiovisuel (ancêtre du CSA), lui intimant l’ordre de remplacer le patron de la Deux, Pierre Desgraupes par Jean-Claude Héberlé, plus docile, niant ainsi l’indépendance de l’instance aux yeux de tous. Il n’est donc pas abusif d’écrire qu’en matière de contrôle du petit écran, Laurent Fabius possède un bon CV. Toutefois, vingt-cinq ans plus tard, regarder deux chaînes, mêmes les principales, et en tirer comme conclusion que « les écrans dégoulinent de sarkozysme », c’est un peu court. Aujourd’hui, la moitié de la population française reçoit gratuitement dix-huit chaînes et consomme essentiellement des films, des séries et du sport. Les plus jeunes ne regardent presque jamais les informations, sauf les infos sur les stars académiciens, le temps qu’il fera demain (ça, ça ne change pas) et les clips (si, il y a des infos écrites sur les chanteurs en dessous des images). Qu’il est loin le temps où Alain Jérôme recevait dans les Dossiers de l’Ecran d’éminents spécialistes ou témoins pour un débat enfumé mais rarement fumeux. On ne mesurait pas l’audience, il n’y avait que trois chaînes. Tout le monde affirmait admirer Apostrophes, illustre autel de la littérature, avant que Médiamétrie en 1987 ne lui assénât un coup bas en révélant la vérité cachée : ils l’aimaient, mais ne la regardaient plus, s’en détournaient pour une petite aguicheuse, plus pimpante. La garce ! La Une refaite et privée en plus ! On ne comptait pas vraiment le temps que chaque politique passait à l’antenne, il n’y avait pas cette équité scolaire absurde censée garantir un équilibre entre l’opposition et le gouvernement, érigée en table de loi pour protéger nos Libertés, comme une ceinture de chasteté protégeait la femme d’un seigneur parti guerroyer. Sarkozy est omniprésent dans les médias ? So what ? Il se met en scène comme dans un reality show et les chasseurs d’images en redemandent. Acteur politique au bras d’un mannequin, il fait de l’audience, alors on le voit. Vous avez du temps de cerveau disponible pour le regarder, profitez-en. Avouez, Messieurs les contempteurs, que vous êtes jaloux d’un tel succès. On sait que le pouvoir attire et excite certaines femmes, et la petite histoire des Républiques Françaises regorge de conquêtes féminines par nos Présidents et chefs de gouvernements. La différence, c’est qu’il fallait les cacher : le sexe et l’amour appartenaient à la sphère privée, et souvent il y avait une légitime à la maison. Avec Carla Bruni, Nicolas Sarkozy explose encore une fois les coutumes : il affiche sa belle chanteuse, sa vie privée, il vit dans son époque, il est un people (on les reconnait aux lunettes de soleil) et en plus il dirige le pays. Difficile de faire mieux ! Ah si, il aurait pu aussi être sélectionneur de l’Equipe de France de foot, mais c’était déjà pris.
@ 08 janvier 2008

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