lundi 9 juillet 2007

LE TEMPS DES MAGICIENS


Tous les magiciens ne prononcent pas la même formule pour combattre les forces du mal. Cette semaine, deux grands sorciers utilisent des sortilèges pour triompher de leurs ennemis ; le résultat en sera forcément différent. Le célèbre Harry Potter tente de convaincre les fonctionnaires du ministère de la magie que celui-qu’on-ne-doit-pas-nommer est de retour. Ces incrédules se protègent en nommant un nouveau directeur dont la tâche principale sera d’humilier le présomptueux chenapan. Heureusement, le malicieux enchanteur vaincra les méchants et les lâches, non sans subir de douloureux dommages collatéraux. Encore plus fort, Nicolas Sarkozy emploie deux incantations à la fois, la première pour détruire de l’intérieur le Parti Socialiste, la seconde pour faire avaler des couleuvres à ses amis. Répertoriée sous le terme d’Ouverture dans le grand livre de la magie politique, cette pratique qui englobe les deux charmes est particulièrement complexe à réussir et nécessite une dextérité, une expérience et une puissance au dessus de la moyenne. Nombreux sont ceux qui l’ont invoquée ; peu y sont parvenus sans créer de terribles effets pervers : révolution, dissolution, échec aux élections. Les outrecuidants mages ne sont plus que souvenirs oubliés… Nicolas Sarkozy prouve qu’il n’a pas peur de l’échec, car sa confiance est inébranlable. Il faut dire que le terrain est propice aux expérimentations : le PS n’en fini plus de s’effondrer sur lui-même, ses membres éminents fuient par chaque ouverture, tels des éphémères attirés par la lumière brillante du soleil. Ils savent qu’ils vont brûler, mais ils foncent droit devant. Car derrière eux, la sirène Segolenator avance et ne leur laissera aucune chance. Entre deux maux, autant choisir celui que l’on n’a pas encore subi. Plus difficile, la seconde partie de l’enchantement consiste à violer la droite qui pensait avoir gagné le droit à participer à une politique économique libérale et qui observe ses adversaires lui prendre les postes auxquels elle prétendait. Il s’agit, mesdames, messieurs, d’un tour extrêmement difficile, je vous prierais de retenir votre souffle, de vous armer de patience et de me faire confiance. Dès que le premier sortilège aura rempli son office, à savoir la désintégration de la gauche classique, je viendrais solliciter quelques-uns parmi vous pour bâtir le grand parti du Président, ni droite, ni gauche, ni centre. Des hommes et des femmes, à parité, des blancs, des noirs et des arabes, à parité, des asiatiques s’ils le demandent, chaque tranche d’âge représentée, des gays et des hétéros, des sportifs et des fumeurs, des patrons et des salariés, tous à parité. Et nous montrerons au monde que la France est redevenu le pays le plus progressiste du monde. Ensuite, je vous montrerai un nouveau tour de magie pour résorber le déficit public. Applaudissements. Mérités. Après Besson, Kouchner et Bockel, DSK et Jack Lang vont-ils être « piégés » à leur tour par le nouvel Houdini ? Certains socialistes applaudissent, François Hollande garde seul une maison gruyère qu’il défend avec conviction et sans espoir, face à la double adversité de Ségolenator et du magicien Sarkozyni. En 1969, le grand Ensorceleur Mitterrand avait métamorphosé la SFIO en PS, avec la rose comme baguette magique. Il semble bien que 2007 sonne comme le début de la fin de cette formidable illusion, qui parvint à brouiller les esprits de nombreux spectateurs pendant près de quarante ans, survivant à son créateur. Et voici que s’annonce la tempête fomentée par une magicienne nouvellement diplômée, pour que renaisse le mirage d’une gauche républicaine responsable. La magie n’est pas prêt de quitter le monde.

PG-09 juillet 2007