vendredi 30 novembre 2007

VITE UNE GAUCHE RESPONSABLE !

« Le processus [de rénovation du PS] en cours est un artifice pour ne pas prendre de décisions. » Manuel Valls –le JDD du 25/11/2007


Aucune démocratie ne peut se passer d’une opposition construite. C’est encore plus vrai en France, qui reconnaît à la rue autant de légitimité qu’à ses élus. Si une minorité conteste le choix de la majorité, exprimé dans des projets ou des propositions de lois, il lui suffit d’entamer une grève, ou encore de manifester bruyamment son désaccord ou même d’occuper des universités ou n’importe quel lieu public, pour trouver un relai dans les médias. Pour faire régner l’ordre, personne n’osera envoyer la troupe, car les injures suprêmes seraient de sortie : fasciste ! raciste ! Alors, en toute impunité, sans que personne ne soit plus choqué que cela, nos boutefeux poursuivront leurs insoumissions au pouvoir en place, se réclamant de mythes gauchistes d’un autre temps, et s’assurant de la sympathie d’un peuple toujours prompt à idolâtrer les principes de la Révolution en oubliant la Terreur. Sous la Ve république, chaque victoire de la droite a été suivie de mouvements de rue, la gauche déconfite abandonnant toute opposition démocratique. Il n’est pas en effet dans la culture des gens de droite que de défiler, et hormis les deux références en 1968 contre la « chienlit de mai » et en 1984 pour sauver l’école libre, les appels à la mobilisation ont rarement dépassé la marche symbolique. La situation actuelle est pourtant inédite. Entre 1965 et 1995, François Mitterrand a écrasé, dans tous les sens du terme, la gauche communiste et socialiste de sa présence. Son départ puis sa mort n’ont aujourd’hui encore pas été surmontés par le PS, alors que le PC n’en finit pas d’agoniser. Il n’y a donc pas d’opposition digne de ce nom dans notre pays, et la déclaration du député-mai d’Evry montre que le chemin est encore long pour créer une sorte de shadow cabinet, ou au moins une opposition partisane structurée capable d’offrir une alternative crédible à Nicolas Sarkozy. Une question reste ouverte : pourquoi François Hollande utilise-t-il des artifices pour ne pas prendre de décisions ? A-t-il le secret espoir que le Président lui propose une mission voire un poste de ministre dans un prochain gouvernement ? De la part de Sarkozy, l’artifice pourrait avoir fait long feu, s’il ne revenait de Chine, qui les a inventés. La politique est un art de la rouerie et ne pas prendre de décision est quand même une prise de décision. L’implosion du PS se profile, déjà fissuré de toutes parts, et ceux que l’on surnomme les éléphants resteront jusqu’à l’épitaphe dans ce panthéon aux illustres figures, de Jaurès à Mendès en passant par Blum. Une nouvelle génération peut en profiter, si elle s’absout des mitterranderies et de ses thuriféraires. Nous avons tous à y gagner, à droite comme à gauche, pour que cessent la domination des pensées simplistes, des inerties sociales et les combats d’arrière-garde. A trop ouvrir pour phagocyter, on prend le risque de perdre la force de la pensée contestatrice soutenue par la motivation d’accéder au pouvoir pour imposer ses idées. Une nouvelle gauche doit se former, pour permettre à la droite de se mesurer à un adversaire capable de développer une rhétorique démocratique et ainsi fabriquer une société toujours meilleure. Que vaudrait un championnat où l’Olympique Lyonnais n’aurait pour seul rival que le PSG ?