dimanche 22 juin 2008

L’EUROPE, UNE NOUVELLE PATRIE ?

Entrez dans le premier bistro venu et vous rencontrerez, accoudés au comptoir, dégustant un crème ou une pression, un sélectionneur de l’équipe de France de football en grande discussion avec un président de la République. Quelques rues plus loin, un premier ministre et un autre sélectionneur s’indigneront de l’incompétence des personnes en poste. La tradition française n’a pas que du bon, mais elle survit durablement aux modes et aux changements de société. Depuis Astérix, nous autres gaulois râlons. Le râleur possède sans aucun doute les gènes dominants parmi les plus puissants pour les imposer à toutes les ethnies venues se métisser sur notre sol. La période actuelle est évidemment extrêmement propice à la rouspétance, entre l’élimination de l’Euro foot et la hausse du prix des carburants. A une semaine de la présidence française de l’Europe, dont l’Elysée souhaite faire grand cas, le temps est venu d’exhiber nos qualités à la face du monde : l’esprit critique, la morgue et l’individualisme. Pour rester sur un des deux sujets de prédilection de l’hexagone, le football, je me permettrais une remarque qui serait du plus bel effet au café du commerce. Depuis plusieurs années, nos ambassadeurs du ballon rond ne chantent pas la Marseillaise à l’unisson lorsque l’hymne retentit dans le stade. Entre ceux qui ânonnent, ceux qui gardent bouche close et les rares qui s’égosillent, comme Lilian Thuram, dont on ressent que jouer pour son pays signifie énormément, l’hétéroclisme est de mise. Il aura fallu le canular d’un amuseur pour qu’une fois, une seule fois, l’équipe de France pose la main sur le cœur et glorifie sa patrie aux yeux du monde. Or, ce comportement se distingue de celui des autres nations, de l’Italie à l’Espagne, de l’Allemagne au Pays-Bas, sans parler de la Turquie ou de la Croatie. Ce qui peut n’être qu’un détail insignifiant au premier abord retentit à mes oreilles comme la trompette de l’échec patriotique. Trop souvent confondu avec le nationalisme, sous la plume intentionnelle de la gauche internationaliste dans la première moitié de XXe siècle, et ainsi stupidement réduit à une valeur de la droite extrême, le patriotisme constitue le ciment irremplaçable entre les citoyens d’un même pays. A la différence du nationalisme, il est soluble dans l’Europe, qui deviendrait alors la nouvelle entité pour laquelle tout un chacun est prêt à se battre. Il y a loin de la théorie à la pratique et souhaiter un patriotisme européen ne revient pas à croire que cette utopie est possible. Pour lui donner un semblant de chance, il aurait fallu déjà commencer par instituer il y a de nombreuses années une conscription paneuropéenne. On pourrait imaginer la remplacer avantageusement par des échanges interscolaires dès la classe de sixième, avec un trimestre consacré à un enseignement européen dans un pays d’accueil pour tous les élèves. Ouvrir les nouvelles générations à la proximité géographique et aux différences culturelles serait une avancée irrésistible vers une construction voulue par tous et non imposée par quelques-uns. Je trouve honteux de stigmatiser les Irlandais, coupables de déjouer les plans d’une élite politique, et de nier leur choix en leur demandant de revoter jusqu’à ce qu’ils acceptent le texte. Autant bourrer les urnes à l’avance ! De grâce, profitons de cette Présidence française pour orienter l’Europe vers une direction harmonieuse. Si cela est encore possible…

@ 22/06/08

LE TRAVAIL REDEMPTEUR

Le candidat Sarkozy l’avait annoncé, il allait remettre la France au travail. Après quelques errements, nous voici repartis dans le droit chemin. La réforme des 35 heures, ciment de la droite, va-t-elle enfin voir le jour ? Début juin, les ministres de l’Emploi des 27 pays de l’Union Européenne ont fixé les règles afin de faciliter le travail à la carte : mieux encadré selon Xavier Bertrand, le temps de travail pourrait, sur la base du volontariat, atteindre les 60 heures. Au Parlement de prendre ses responsabilités pour accroître cette liberté en votant à l’unanimité en faveur de cette mesure. Syndicats et gauche tentent de contrecarrer cette indispensable adaptation au monde contemporain en se plaçant sur le terrain du social, du sens de l’Histoire et de la protection de la santé : régression voire semi-esclavage, selon une socialiste espagnole, quand l’époque est à la vie de famille. Cette réaction illustre admirablement la fracture principale entre la gauche et la droite, une frontière protégée par des convictions plus infranchissables que des barbelés. La caricature de l’autre s’impose comme argument incontestable, renvoyant aux pires heures du capitalisme : les patrons exploitent, les travailleurs subissent. Les privilégiés grossissent, les salariés dépérissent. A traits à peine moins grossiers, nos syndicats nous expliquent la fin du modèle social européen. Le ridicule ne tue plus, tant mieux. En France, la mère des 35 heures, Martine Aubry, renaît icône de ce monde plus humain, amassant au passage des points pour la conquête du parti socialiste. Effet d’aubaine inespéré pour l’ancien numéro 2 du gouvernement Jospin, qui devient fort logiquement une alternative crédible au poste de premier secrétaire du PS. On peut se réjouir de la bonne santé de notre démocratie quand la diversité des opinions est aussi tranchée. On peut également s’étonner d’une vision aussi tronquée de la réalité sociale, 20 ans après la chute du mur de Berlin et l’effondrement du bloc de l’Est. La fin de notre monde s’approche à la vitesse de la lumière : avec la surpopulation et l’épuisement des ressources naturelles utiles et connues, sonne à notre porte le tocsin de la famine, héraut des guerres, et source des flux migratoires accrus du sud vers le nord. Cette situation terrifiante suggère deux attitudes : profiter maintenant de nos richesses, avec nos proches, en refusant un système qui a échoué à fabriquer un avenir radieux pour tous. C’est un renoncement au futur, mais aussi un rejet du passé, désigné coupable de notre présent chaotique. On peut également croire dans la vertu du travail, sans être dupe du système, mais en se reposant sur la force du progrès. Les vieux adages, outre qu’ils nous replongent dans de mythiques âges d’or, recèlent une puissance évocatrice bien utile quand le découragement survient. Si tous les gars du monde voulaient se donner la main…me revient en tête, et malgré sa naïveté apparente, cet espoir dans l’humain, enterré par les cinquante premières années du XXe siècle, ne doit jamais nous quitter. Nous sommes une génération privilégiée, dont les aïeux ont payé le prix du sang pour nous permettre de vivre libre. Nous sommes leurs débiteurs, et cette dette se remboursera en construisant pour nos descendants un monde dont ils seraient fiers, fondé sur les valeurs du travail, de la liberté et de la fraternité.

@ 15/06/08

jeudi 12 juin 2008

UN NOIR A LA MAISON BLANCHE

Un noir à la Maison Blanche ? Pas tout à fait, et de nombreux observateurs prédisent une victoire facile pour le Républicain John Mc Cain le 4 novembre prochain face à son opposant démocrate Barack Obama. Pour autant, une élection n’est jamais gagnée avant d’être jouée, aux Etats-Unis plus qu’ailleurs, tant le système des Grands Electeurs peut altérer un résultat : où en serait le réchauffement de la planète si Al Gore, conformément à sa victoire en nombre de voix, avait été élu Président en 2000 ? L’essentiel n’est pas la. Un afro-américain candidat à l’élection présidentielle, soutenu par le parti démocrate et donc des millions d’américains, voici la preuve d’une maturité sociétale dont de nombreuses nations devraient s’inspirer. A commencer par la notre. Combien y-a-t-il eu de ministres noirs issus de l’immigration dans les gouvernements français de ces trente dernières années ? Michel Noir ne compte pas. Et
ce n’est pas faire injure à Rama Yade de dire qu’elle est d’abord une jeune et jolie femme avant d’être noire. Entendons nous bien : il ne s’agit pas de chanter avec Nino Ferrer « Je voudrais être noir » ni d’insinuer que la couleur de peau a une quelconque incidence sur les compétences, ou encore que le pouvoir d’achat des français se porterait mieux si les ancêtres de Nicolas Sarkozy venaient du Cameroun plutôt que de Hongrie. Un présidentiable noir en 2012 semble chimérique, tout autant qu’un premier ministre ou un ministre des finances. Toujours prompts à railler l’oncle Sam pour ses exubérances, nous venons de recevoir une leçon d’intégration de cet allié dont on oublie trop souvent l’énorme travail accompli sur le terrain et dans les médias pour amender les esprits des red necks, cette frange de la population qui n’a jamais quitté son Etat. La série 24 (24 heures chrono en France), qui existe depuis sept ans, a installé dans le fauteuil du bureau ovale un noir, à la fois bienveillant et ferme, avant de le faire assassiner par des traitres à la patrie ; cinq ans plus tard, son frère reprenait le flambeau dans la grande tradition mythique des Kennedy. Quand on sait que cette série a servi de base de réflexion très sérieuse sur l’usage de la torture dans une démocratie en temps de paix auprès des juges américains les plus éminents, et ce dans plusieurs colloques internationaux, on peut imaginer l’impact subconscient d’une situation fictionnelle sur les cerveaux les plus perméables aux images. Impossible de concevoir la moindre comparaison avec la France, hormis dans le cadre de la science-fiction, qui n’est pas le genre préféré de nos compatriotes cartésiens… Faut-il s’en inquiéter ? Assurément car comme souvent dans l’hexagone, nos experts confondent lutte contre la xénophobie et contre la discrimination, et politique d’intégration. Insulter une personne sur la base de sa religion, son origine ethnique ou la couleur de sa peau est considérée comme une offense d’une gravité extrême, passible de prison. L’absolue défense de la victime, fondement du droit français, est à mon sens une fois encore source d’effets pervers dommageables : à vouloir perpétuellement se repentir d’une Histoire volontairement mal interprétée, nous obérons chaque jour un peu plus l’avenir d’une vieille nation dont les racines mixtes et variées doivent constituer les fondements d’une Europe puissante, unie et clairement identifiée géographiquement.

@ 08 juin 2008

MARIAGE DERANGé

Quelques mois à peine après l’union de Nicolas Sarkozy et de Carla Bruni, un mariage provoque à nouveau un raz-de-marée de commentaires parmi les politiques. Un mariage ou plus exactement l’annulation d’un mariage. Aucun people concerné, d’ailleurs les noms des personnes ne sont jamais cités. Toujours prompts à s’émouvoir des atteintes aux droits de la femme, tous nos parangons de justice de droite et de gauche condamnent la décision du tribunal de Lille, à l’exception notable du garde des Sceaux. Or la justice n’a fait qu’entériner un accord d’annulation entre les deux époux, dont on sait seulement qu’il se fondait sur la dissimulation par la femme de la perte de sa virginité avant le mariage. Le tribunal s’est donc prononcé sur la base du mensonge pour annuler l’union, mais n’a jamais porté de jugement sur la chasteté prénuptiale de l’épouse. Il est donc aberrant de tirer sur le pianiste. Ce n’est pas la décision de justice qu’il faut critiquer, et nous ne sommes pas à Kandahar. En revanche, nos représentants auraient tout intérêt à s’interroger sur une société laïque qui continue en 2008 à autoriser des attentes sexuelles et des pratiques matrimoniales archaïques et coercitives. La tolérance est un échec qui a fait ses preuves depuis Munich 1938. Face à des religions, des formes de pensée ou des régimes politiques irrespectueux des libertés octroyées par les démocraties, nul ne peut plus, nul ne doit plus être tolérant. Il s’agit d’une question de survie pour notre société. Les règles doivent être les mêmes pour tous, et elles doivent être appliquées avec les mêmes égards et la même sévérité pour tous. Catholique, musulman, juif ou bouddhiste pourquoi pas, mais ne demandez pas à l’Etat de gérer vos singularités. Pour autant, la pensée unique frappe une nouvelle fois. Quel scandale qu’un homme attende d’une femme qu’elle soit vierge avant le mariage ! Et si cette femme le souhaite ardemment, est-elle forcément l’objet d’une pression machiste ? Au nom de quoi porte-t-on un jugement de valeur sur la sexualité ? Ah oui, on ne fait pas toute une histoire pour un homme, c’est vrai. L’homme peut faire ce qu’il veut, sans risque d’être lapidé, condamné, méprisé. Exact. Résidu de la préhistoire qui n’est pas encore terminée, la domination physique du male sur la femelle s’impose comme l’évidence (si l’on excepte les années communistes de la RDA). Imaginons maintenant une société où la femme réclame l’annulation du mariage car son conjoint ne possède pas une virilité suffisante. Est-ce envisageable, est-ce condamnable ? C’est surtout peu crédible, car à moins qu’on ne force le mâle à exhiber l’objet du délit, il niera forcément être dépourvu d’un attirail de qualité. Heureusement, les interrogatoires des juges étant désormais filmés, il suffira à un astucieux producteur de coproduire avec un tribunal de province une délicieuse émission de télévision pour rendre l’aventure nettement plus délectable.

@ 01 juin 2008

LE SURREALISME TRIOMPHANT

André Breton l’avait rêvé, le XXIe siècle l’a réalisé : le surréalisme a triomphé dans nos sociétés. Ce mouvement subversif fondé sur l’écriture automatique connait de nos jours un aboutissement imprévisible. Breton appelait de ses vœux l’alliance du réel et de l’imaginaire : il suffit de lire les pages d’accueil sur le net de n’importe quel quotidien pour constater la réalité de cette victoire. Les titres de une défilent sans lien apparent, comme si des idées incongrues, terribles, inutiles, amusantes, traversaient l’esprit d’un démiurge inassouvi. Tremblement de terre en Chine, Raz de marée en Birmanie, Royal candidate au PS, dernière journée du championnat de France de football, Woody Allen à Cannes, Naples sous les poubelles, la déforestation de l’Amazonie continue, grève des pécheurs… La qualité dans la quantité ou une liste à la Prévert, toujours dans les bons coups dès qu’il s’agit de jouer avec les paroles. Einstein pourrait être convié à cet exorde, afin de démontrer que la relativité n’est pas un vain mot et qu’à rendre les cadavres exquis, les nouveaux surréalistes de la toile en oublient la hiérarchie. Mais quelle est-elle ? Le bon peuple, qui résiste du fonds des âges, adore toujours les mêmes idoles : sportifs/guerriers, Cannes/Dionysies, comédiens/tragédiens, et acclame et conspue les mêmes dirigeants : président/tyran/stratège, Assemblée/Ecclésia. S’il s’émeut du sort des victimes de la nature, grâce à la puissance émotionnelle véhiculée par les médias, il oublie jusqu’à leur existence une fois les feux des projecteurs éteints. Il trie ses déchets, donne son aide bénévole pour nettoyer les plages, conspue les conducteurs de 4x4 mais regarde avec des yeux vides son oxygène s’évaporer depuis l’Amérique du Sud. La famine revient en force, et le diesel coute aussi chez que l’essence. Quelle est la priorité ? Le PSG, l’Euro Foot qui se profile, les Jeux Olympiques en direct ou le flash sur la dictature militaire au Myanmar. Il aura donc fallu un cyclone, responsable de 134 000 morts pour que l’Occident s’intéresse à nouveau à un pays écrasé depuis près de vingt ans pas une armée sanguinaire. Cela ne durera pas, tout doit rentrer dans l’ordre prochainement. Roland-Garros s’échauffe porte d’Auteuil, quelques poussées d’adrénaline sur les bancs de l’Assemblée, des échanges en couleur entre sarkozystes et socialistes, deux trois manifs avant l’été et la France peut se rendormir au soleil de son mécontentement chronique de vieille nation neurasthénique. Cela vous semble surréaliste ? Je suis sur que non, car rien n’est original ni choquant dans cette péroraison. Il ne peut y avoir de prise de conscience collective car la masse n’est que négativité. En ce sens, le web incarne exactement la société moderne : instantanée, boulimique, désordonnée, foisonnante, incontrôlable. Et avec une mémoire intrinsèque qui devrait sédimenter son histoire mais qui se noie dans les sables mouvants de l’urgence de la nouveauté. Ceci n’est pas notre temps.

@ 18 mai 2008

EXHIBITIONNISME

Homme ou femme de gauche, vous ne saviez pas comment célébrer dignement les vingt-sept ans du 10 mai 1981 ? Réjouissez-vous, le dernier avatar de la révolution rouge s’est invité chez vous dimanche dernier par le petit trou de la lucarne magique. Le leader de la ligue communiste révolutionnaire a choisi le service public et Michel Drucker pour fabriquer de nombreux prosélytes. Sincère et charismatique, selon les propres termes de l’animateur, Besancenot n’a peut-être pas crevé l’écran, mais il a réussi une mystification remarquable en psalmodiant des diatribes anti-capitalistes et anti-Sarkozy, tout heureux de se voir octroyer si belle tribune. Il a compris, à la différence de certains de ses camarades du parti, que dans une élection comptent désormais à parts égales la notoriété et le capital sympathie. Pour ce qui est des idées, 80% des électeurs n’y comprennent rien, sauf à ce qu’elles renvoient concrètement à leur quotidien. Alors, chers amis de la gauche révolutionnaire, profitez des tribunes populaires pour asséner vos énormités avec le sourire ou la bouche en cœur. La démocratie cathodique vous y encourage, et vous serez récompensés au centuple dans les sondages. Reste un point sur lequel il ne peut être question de transiger : les atteintes à la vie privée. On ne rit plus du tout. Un cliché dans la presse ne me plait pas, tribunal. Une petite phrase m’agresse, diffamation. On m’a surveillé à mon insu, plainte contre X. La gauche n’hésite plus à faire appel à la justice pour obtenir réparation des affronts et des abus subis. Mais quand on est personnage public, où s’arrête la frontière avec la vie privée ? C’est simple : c’est au bon vouloir du pipole. Pratique, comme si un exhibitionniste se plaignait au commissariat du coin d’être observé par son voisinage lorsqu’il en assez. On savait la société française en marche forcée vers une judiciarisation à l’américaine. Il faudra désormais tourner sa langue sept fois dans sa bouche avant de parler, relire encore et encore son article avant de le publier et analyser chaque photographie avant l’impression. Sinon, un procès. Soyons honnête, ce n’est pas nouveau, et certain haut dirigeant de droite y a eu recours il n’y a pas si longtemps.... Cependant, certaines personnes que je ne nommerai par pour ne pas prendre de risque (courageux mais pas téméraire), certaines personnes donc se parent dans leur vertu pour insulter à qui mieux mieux gouvernement et présidence puis n’hésitent pas au moindre écart de langage les impliquant à riposter par voie judiciaire. Cette défense manque singulièrement de panache, et s’il ne s’agit pas de remettre au goût du jour les duels au sabre pour laver l’honneur perdu, on pourrait espérer plus de fair-play et d’esprit dans les affrontements entre les représentants de la nation. Les bons mots et joutes de saillie feraient grand bien à ceux qui prétendent nous diriger aujourd’hui et dans le futur. L’humour a disparu de la politique, fondant plus vite que les pôles sous l’effet de serre, nous laissant orphelin d’une tradition française pourtant solidement établie et aujourd’hui incarnée par le seul André Santini, dans le rôle ingrat de dernier grognard de l’esprit français. Un jour, ce bastion cédera et les avocats se frotteront les mains. Non seulement on ne pourra plus rire de tout, mais on ne pourra plus rire du tout, sous peine de finir sa vie SDF ou en prison. Heureusement, il y aura toujours la télé en cellule, et on pourra se moquer des politiciens sans crainte de représailles en riant sous cape.

@ 11 mai 2008

L’ESPRIT DE MAI

L’esprit de mai. Expression fleurie, aux fragrances variées. Elle évoque pour toutes et tous souvenirs, espoirs ou désillusions. Naturellement est sous-entendu l’année : 1968. Et pourtant, dix ans auparavant se déroulèrent des évènements déterminants pour l’avenir de la nation. Qui se souvient encore de mai 1958, tout aussi décisif pour la France que l’effervescence de la jeunesse frustrée de la fin des sixties ? Du putsch d’Alger au retour du Général de Gaulle, de la disparition de la pathétique IVe République à la création de la Ve, voila pour un cinquantenaire éclipsé jusqu’à présent par le bruit et la fureur des années rebelles. Entre ces dix années, tout un monde, rendu possible justement par une modernisation des institutions. Un point commun : l’esprit de révolte, cette nécessité d’avancer contre des immobilismes intolérables. Deux générations suivantes, on vénère d’autant mieux le passé qu’il est devenu fantôme. Mai incarne désormais le mois de vacances avant les vacances. Entre les nombreux jours fériés prolongés de ponts et les derniers jours de congés payés annuels à prendre avant le 31 mai, il s’agit de se montrer le plus futé pour être absent de son bureau un maximum de temps. Certains se débrouillent mieux que d’autres. Ainsi l’Education Nationale appelle-t-elle à la grève le 15 mai, il restait un jour dans le mois où l’on travaillait. Avec un peu de chance, le mouvement peut prendre de l’ampleur, certains lycéens escomptant bien relever le flambeau non pas de la flamme olympique, mais de l’esprit de mai, le mois de vacances avant les vacances. Catastrophe ! Le ministre Darcos veut briser l’élan en imposant le service minimum d’accueil. Casseur de grève, que faisais-tu en mai 68 ? As-tu oublié le plaisir des barricades, les A.G improvisées où l’on pouvait dire n’importe quoi, la plage sous les pavés ? Certes, le SMA (la peste soit de ces apocryphes) ne concerne que les écoles primaires mais tout de même, on ne peut tolérer ce dénigrement du Droit de Grève. Heureusement qu’à Paris, Seigneur Bertrand, l’ami du Dalaï-Lama, a pris fait et cause pour protéger ses gueux des dérives du pouvoir élyséen. La capitale, chacun le sait, est réputée pour faciliter la vie des fonctionnaires ; les autres parisiens, ils votent à droite, c’est dire s’ils n’existent pas. Quant aux enfants, quelle importance, c’est le mois des vacances avant les vacances, ils trouveront logique d’enchaîner les jours de congés. Et en 2048, l’esprit de mai embaumera si fort notre société désintégrée que le brin de muguet lyophilisé vendu en pharmacie désignera le premier jour des vacances d’été. Fermeture obligatoire pour quatre mois de la société française. Réclusion organisée dans des lieux sécurisés pour échapper à la pollution estivale. Cryogénisation alternée pour laisser la Terre en jachère. Alors, les syndicats et la gauche derrière son vieux leader Besancenot se dresseront pour protester contre l’atteinte au droit de grève perpétrée par cette nouvelle technologie de la conservation du travail. Fidèles à l’esprit de mai.

@ 04 mai 2008

LE CANARD, LA POLICE ET LES MILES

Le Canard Enchaîné ne rate jamais une occasion de pointer du doigt les injustices, travers et disfonctionnements de la société française, surtout lorsqu’elles sont le fait du gouvernement, de l’Etat ou de la droite. Dernier scandale en date, les policiers en charge de raccompagner par avion les étrangers indésirables en profitent pour accumuler des miles sur leurs cartes Flying Blue Air France. Quelle honte ! Face à la misère et au malheur, ces infâmes pandores ne reculent devant rien pour améliorer leur quotidien pourtant privilégié. Heureusement, la presse libre, ne comptant que sur son courage, fait trembler la place Beauvau. Honteuse et confuse, elle assure qu’elle ne le fera plus. Bel exemple de civisme. Le plus formidable dans cette histoire n’est pas la réaction immédiate du ministère de l’intérieur. Nous sommes hélas maintenant habitués à la pensée unique qui dicte notre éthique. Le principe : « toute loi appliquée sans le consentement des instances morales du pays, à savoir presse et leaders d’opinion de gauche, y compris sportifs, chanteurs de variété et comédiens, sera contestable car immorale ». Le ministère se comporte donc comme il se doit, profil bas, flagellation et autocritique. Non, ce qui frappe, c’est la force tranquille du Canard, qui au fil du temps, poursuit inlassablement son dessein de dénonciation des abus en tout genre. Devenu une institution, il est apprécié et craint tant par la droite que par la gauche. Même l’épouse du Président de la République y est allée de son compliment. Les guignols de Canal + lui doivent tout. Bref, cet hebdomadaire unique en son genre fait maintenant quasiment l’unanimité. Or, considérant la Terrible Affaire des Cartes de Fidélité, la stigmatisation d’un fait aussi anodin me laisse perplexe. En effet, au premier degré, on peut trouver cela amusant ou honteux ou simplement sans intérêt. En réalité, il s’agit d’un comportement purement humain, par ailleurs très classique dans le cadre d’une entreprise. Notre société capitaliste a mis en place une logique de profit, dont tous nous cherchons à bénéficier. Des invitations à déjeuner par un client aux cartes de fidélisation « pour neuf pizzas achetée la dixième gratuite », des tarifs préférentiels des opérateurs téléphoniques pour les abonnés longue durée aux réductions pour famille nombreuse sur présentation d’un bon d’achat, tout est organisé pour nous faire ressentir l’envie et le besoin d’être un Privilégié. Allons plus loin. Caisses prioritaires pour femme enceinte dans les hypermarchés : cela vous semble normal ? c’est un privilège. File réservée aux taxis et aux bus : privilège. Le communisme est enterré, le 4 août va bientôt devenir une seconde fête nationale. Alors, au nom de quel ordre moral les policiers n’auraient-ils pas le droit de bénéficier comme tout citoyen d’un privilège commercial ? Ah, j’avais oublié : ils reconduisent des immigrés clandestins en avion Air France dans leur pays. C’est mal. Ils ne méritent pas d’être privilégiés car ils sont méchants. En plus, je parie qu’ils prennent des vols à l’heure du déjeuner et qu’ils profitent de leur pouvoir pour que l’hôtesse leur donne un sandwich au fromage ET un sandwich au jambon. Si ça se trouve, ils voyagent même en classe business. Ca rapporte plus de miles.

@ 29 avril 2008

BAGUETTE ANGLAISE

"Ce n'est pas parce que je chante en anglais à l'Eurovision que demain matin la baguette sera moins bonne". Sébastien Tellier, représentant français à l’Eurovision 2008.


Alain Joyandet, secrétaire d'Etat à la coopération et à la francophonie, et Christine Albanel , ministre de la culture et de la communication, en sont bouleversés. Certains députés en perdent le sommeil, d’autres se repassent en boucle France Gall et Marie Myriam. On m’a même rapporté confidentiellement que Céline Dion avait été approché pour former et présider une commission de crise, formée de parlementaires, de professionnels du disque et d’experts psychiatriques. Son objectif : écrire un texte en français à Sébastien Tellier. Non, pas Sébastien Chabal, Sébastien Tellier. Ca ne vous dit rien ? Mais si, notre représentant à l’Eurovision, celui qui chante en anglais. Il semble pourtant que cet évènement surpasse en intensité et en gravité le boycott de la France par un milliard de Chinois, la lente mais inexorable relégation du PSG en ligue 2 et la lente hausse, mais tout aussi inéluctable des prix du carburant. En effet, au pays de Molière, de Voltaire et de Toubon, on ne plaisante pas avec la langue. Passe encore pour une chaîne de télévision à vocation internationale. On peut admettre que tous les étrangers ne comprennent pas la plus belle langue du monde. Quoique… Mais chanter en ANGLAIS, à l’EUROVISION ! Sacrilège, scandale, perte d’identité, reniement de la patrie, en un mot une honte nationale. C'est vrai que l'Eurovision est un concours musical ambitieux, de haute tenue artistique et d'une importance primordiale pour la culture. Citons tous ces noms passés à la postérité : les Olsen brothers, les Sandra Kim, les Lordi, les Bucks Fizz ou les Herreys ont a jamais tracé des sillons profonds dans le sol de la culture musicale mondiale. Pas une journée ne se termine sans qu’une radio ait diffusé Fly on the wings of love ou Diggy-loo-diggy-ley, tubes essentiels qui font ressembler les chansons de Claude François à du Bartok joué par Chostakovitch. Depuis 52 ans, nos candidats ont toujours chanté en français. Nos amis Suisses ont même poussé la francophonie en 1988 à faire défendre leurs couleurs par une québécoise, Céline Dion, dont il est inutile de préciser que sa carrière en fut sérieusement accélérée. Certes, depuis 30 ans, nos tentatives se sont soldées par des échecs et les jurys internationaux ont une oreille plus aimable pour la langue de Sinatra que pour celle de Gainsbourg. Est-ce une raison suffisante pour baisser pavillon ? Non, répondent en chœur nos dignes élus du peuple, bien heureux de détourner l’attention de la populace qui demande du pain en leur offrant des jeux. Quelqu’un m’a également dit que Dany Boon avait été mis à contribution pour imaginer des paroles en Ch’ti. Le gouvernement en a d’ailleurs profité pour lui demander la recette du succès à la française. Pour une fois qu’ils en tiennent un qui fait l’unanimité, autant l’autopsier sur le champ pour en tirer cette substantifique moelle rabelaisienne qui fait notre force : le génie Français. A quelques mois des Jeux Olympiques les plus controversés de l’histoire (en 1936 à Berlin, on n’avait pas fait tant d’histoires, nos ancêtres étaient autrement plus respectueux des régimes totalitaires que nous), une potion magique ne serait pas de trop pour ramener quelques médailles à la mère patrie. Parce que si on compte sur Sébastien Tellier, avec sa chanson en américain, c’est pas gagné…

@ 22 avril 2008

ViVENT LES SONDAGES !

De quoi vivraient la presse si les instituts de sondages n’existaient pas ? Ainsi dans le Nouvel Obs, version net ou version papier, les enquêtes d’opinion se ramassent à la pelle : « OGM : 78% des Français soutiennent Nathalie Kosciusko-Morizet », le NouvelObs.com du 13 avril 2008 ; « 74% des Français estiment que "la période de Mai-68 a eu un impact positif sur la société" », dans la parution du 28 mars dernier. On note que ces scores massifs traduisent des positions totalement opposées au gouvernement et à Nicolas Sarkozy. L’inverse serait sans doute vrai pour Le Figaro. Peu importe, cela fait partie du jeu politique par leader d’opinion interposé. Chaque camp lit son organe d’information et de communication préféré, ne prêtant qu’un regard méprisant aux titres des journaux de ses adversaires. Quel UMP achète Libé sans y être obligé ? En revanche, sur la toile, la gratuité favorise la lecture de toute la presse et aux news et analyses s’ajoutent les réactions des internautes. L’entrisme, dans sa signification basique, à savoir le prosélytisme et le militantisme, règne en maître. On s’invective et on s’insulte, on se reconnait et on se conforte, on complète et on critique. Tous journalistes. Capables d’interpréter avec maestria des chiffres que les meilleurs analystes d’IPSOS ou de la SOFRES hésitent à commenter tant la compréhension d’une déclaration à un instant précis repose sur des critères mouvants. Ah le bon sens commun ! Contre la République des experts se dressera toujours en France non pas celle des imbéciles, n’en déplaisent à certains, mais tout simplement la liberté de penser et d’exprimer cette pensée. On peut le regretter dans certains cas, quand un footballeur interrogé par un animateur donne son avis sur un sujet sans lien avec son domaine de compétence, s’en féliciter quand ce même footballeur prend position en faveur d’une cause et utilise sa popularité pour transmettre un message. Deux situations antagonistes et pourtant comparables, que l’on pourrait renverser pour des effets inverses : si le message est un message de haine et si il révèle une intelligence ou une sagesse dignes d’un expert dans son interview… Alors bien sur, un chiffre de sondage parlera toujours plus directement et plus fortement à un large public qu’une enquête de terrain. Mais un chiffre de sondage peut être interprété par tout le monde, quand seul un journaliste peut rapporter la réalité, les faits. A sa conscience de le guider vers une narration la plus objective possible. A trop vivre selon des questionnaires, à passer la société à la moulinette de la loi des grands nombres, on ne voit qu’une facette désincarnée du monde. Éphémère indicateur pour politicien sans vision stratégique ou support transitoire pour périodique à la recherche d’attrape-lecteurs, un sondage chasse l’autre, le contredit, le plonge dans l’oubli et le néant. Qui se souvient d’une semaine sur l’autre qu’il préférait le bleu alors que tout le monde aime le rouge ? Alors, faut-il privatiser l’opinion publique ? 100% des personnes interrogées dans mon entourage sont pour.

@ 15 avril 2008

LA FAIM DU MONDE

"Si l’on veut couvrir 20% du besoin croissant en produits pétroliers avec des biocarburants, comme cela est prévu, il n’y aura plus rien à manger" - Peter Brabeck, P.D.G de Nestlé, 23 mars 2008
Le mieux est l’ennemi du bien. En voulant à tout prix remplacer le pétrole par les biocarburants, sommes-nous en train d’affamer la planète ? Au delà des considérations purement économiques pour Nestlé, premier groupe agroalimentaire mondial, qui s’inquiète à juste titre pour ses futurs profits, que faut-il penser de cette alerte à la famine ? Depuis 1992 et les débuts de la production industrielle des biocarburants, on a eu le temps d’en analyser les avantages et les inconvénients : réduction de la facture d’énergie, optimisation de notre agriculture, lutte contre le réchauffement de la planète. Dans le même temps, forte augmentation du prix des céréales et de la famine dans les pays du Sud, y compris chez les producteurs de blé ou de graines oléagineuses. En France, l’ambition est d’atteindre 7% de biocarburants dans la consommation totale. Noble objectif au regard de la pollution mais ne jouons-nous pas à l’apprenti-sorcier en encourageant une situation qui risque de dégénérer en fabriquant des hordes de crève-la-faim ? Les scientifiques devraient plutôt se pencher sur le macdocarburant, fondé sur la nourriture de la célèbre marque de fast-food, présente même en Chine, avec ses frites et ses hamburgers. Un savant dosage, une distillation habile, renouvelable aisément, des points de stockage et de vente partout dans le monde, pourquoi s’en priver ? Politiquement correct : lutte contre la malbouffe en harmonie avec la lutte contre les effets de serre, lutte contre l’obésité agrégée à la baisse du prix des céréales. Mettez un MacDo dans votre moteur pour rouler malin ! On se demande pourquoi personne n’y a pensé... Selon Pékin, la raison principale des émeutes tibétaines est d’ailleurs la fermeture dominicale du Mac Donald de Lhassa, alors que le dimanche est le seul jour où les moines sont autorisés à aller en ville. Heureusement, ces derniers ont appris récemment que le passage de la flamme olympique serait visible de leurs cellules, puisque celles-ci sont toujours tournées vers l’Everest. Qui a dit que les Chinois ne sont pas humains ? De toute façon, ces tibétains manquent franchement de dignité. Se révolter alors qu’ils ont les Jeux Olympiques … Et nous alors ! Ils pourraient nous montrer un peu plus de respect, à nous autres français, qui avons subi un affront lorsque les jeux de 2012 ont été refusés à Paris. Proposons-leur donc un échange : les tibétains à Paris et les français au Tibet. Ainsi nous aurons nos JO et eux pourront profiter à plein des biocarburants. De toute façon, ces moines bouddhistes ont toujours eu la tête dans les nuages, de vrais écolos sans le savoir. A eux le bonheur de circuler dans Paris, à nous les joies du vélib chinois. De plus, en nous organisant bien, nous pourrons aller regarder nos militaires se faire massacrer par les intégristes en Afghanistan. Pékin, Himalaya, Kaboul, ça doit se trouver dans le même coin, loin, très loin de chez nous…

@ 26 mars 2008

"Quand les stars vendent leurs soirées aux enchères » - Le Figaro, 14 mars 2008

De l’inconséquence ou tout simplement de la bêtise ? De l’impatience ou de l’ignorance ? Depuis Henri Rochefort, nous savons que les sujets de mécontentements du peuple français sont proportionnels au nombre d’habitants ou à peu près. Les médias nous ont rebattu les oreilles et les yeux de la baisse du pouvoir d’achat, la gauche a confirmé sa compétence à crier au loup à chaque sortie décomplexée de Nicolas Sarkozy, le gouvernement a oublié de raconter son action et de rassurer : les premières élections locales ont donc servi d’exutoire à tous les ressentiments, frustrations et incompréhensions de nos compatriotes, toujours prompts à se plaindre qu’on ne fait rien pour eux. C’est évidemment tout le contraire. Face à la rupture en marche, les forces de résistance jouent en défense. La gauche fait preuve une fois de plus de son irresponsabilité en confortant son électorat dans des valeurs rétrogrades et dangereuses pour l’avenir du pays. A croire qu’elle n’a jamais gouverné ce pays ! François Mi-qui ? Lionel Jos-quoi ? Ah non, jamais entendu parler. Les 35 heures, le RMI, les déficits, la droite vous dis-je. En revanche, l’ouverture avec un ministère à la clé…pourquoi pas, mais avec un chauffeur de fonction. L’engagement, la sincérité, le combat pour des idéaux ne sont décidemment pas de vains mots pour certains politiciens. Pour mieux les apprécier, pourquoi ne pas se les offrir à dîner ? Le Figaro consacre un article à un étrange phénomène, fort éloquent sur l’état de notre société : la vente aux enchères, au profit d’associations caritatives, d’une soirée en compagnie d’une star. Le journal parle de Drogba, MC Solaar et Richard Berry, ce qui relativise déjà beaucoup la notion de star. Imaginons donc un repas avec Ségolène Royal ou François Hollande : combien êtes-vous prêt à payer pour avoir l’un ou l’autre à votre table ? Prix spécial pour le couple, divertissement assuré en prime. Vous feriez œuvre de charité puisque votre argent pourrait financer leur retraite ou même le déficit de la sécurité sociale. En Suisse, rapporte le Figaro, une opération organisée au profit de la Croix-Rouge avait montré le peu de popularité de certains élus. Allons, Mesdames et Messieurs les politiciens, c’est pour la bonne cause : tout ces gens auxquels vous serrez la main rapidement sur les marchés, à qui vous promettez miracles et espoir, tout ceux qui croient en vous comme les enfants croient au Père Noël, se réjouissent de vos victoires et se désespèrent de vos échecs, vous allez pouvoir leur rendre un moment de bonheur en partageant leur pitance. Car ils existent vraiment, les vrais gens, avec leurs soucis quotidiens, et vous leur devez des comptes. Une simple soirée, ou même un déjeuner, une partie de PS2 avec les enfants ou assis sur le canapé avec eux pour regarder PPDA, cela n’a pas de prix. Il est d’ailleurs probable que vous n’ayez même pas à parler. Ils vous regarderont avec leurs yeux de merlan-frits, comme le serf devant son seigneur. C’est bien ainsi que vous l’entendez de toute façon, n’est-ce pas ? Quelle belle invention, la démocratie…

@ 19 mars 2008

"Je n'ai pas l'intention de renoncer à ce que je crois pour participer à des manœuvres électorales", François Bayrou le 10 mars 2008

Le Vatican vient de rafraichir la notion de péché en y injectant une dose de mondialisation. Par la voix de Mgr Gianfranco Girotti, son responsable de la Pénitencerie apostolique, l’Eglise Romaine a expliqué que le péché avait désormais « une résonnance sociale » qui dépassait l’individu. Les sept péchés capitaux et leurs innombrables avatars font pâles figures face à la pollution, les manipulations génétiques ou l’injustice sociale. Durant des siècles, le Paradis était fermé aux paresseux, mais depuis les 35 heures, l’Enfer affiche complet. Le péché de gourmandise n’a pas résisté aux publicités alimentaires, la luxure à Canal+ et à internet ; l’orgueil est devenu une qualité, l’avarice une nécessité bancaire, la colère peut être saine dans la bouche d’une candidate à la présidentielle. Reste l’envie, moteur de l’homme moderne. Si l’on ne doit pas désirer la femme de son voisin, on peut envier ce dernier, surtout s’il s’appelle Brad Pitt. Au Modem, on envie beaucoup le PS qui est en passe de gagner des villes aussi importantes que Marseille, Strasbourg ou Toulouse. Au Modem, on a des croyances qui empêchent d’entamer des négociations globales avec les dirigeants de l’UMP. Au Modem, on préfère être humilié par Bertrand Delanoë plutôt que d’empêcher sa réélection en s’associant à la droite. Il est vrai que son électorat, les bobos parisiens, cette pathétique engeance incompréhensible en province, adore les beaux Vélib’ qui font la nique aux méchantes voitures pollueuses, raffolent du zoli tramway et des zolis quais ensablés de Paris-Plages. Pourquoi changer quand le magicien socialiste jette sa poudre aux yeux avec tant de maestria ? Il a tant fait pour les crèches, ouvrant des places dans les quartiers de l’Est de la capitale qui en manquaient tant. Il n’y a pas assez de puéricultrices pour s’en occuper ? Quelle mauvaise foi ! Croyez-en moi et vous serez récompensés, mais après le 2e tour. La messe est dite à Paris, qui la vaut bien d’ailleurs. Frère Bertrand, respectez le Père François et acceptez au côté du bedeau Denis sa seigneurie Marielle pour une alliance hégémonique contre les démons du mal, enterrés par Chirac sous la mairie depuis 1977…Ce n’est pas l’envie qui me manque, répond-il, mais je n’en ai guère l’usage. La victoire est acquise, Dieu m’en est témoin. A l’autre bout du monde, à Marseille, comme souvent c’est une sacrée bouillabaisse : pour une histoire d’incinérateur conservé à Fos-sur-Mer, le centre tombe dans le panier à crabes de la gauche. Sur la Canebière, on a vu roder le fantôme de Gaston Deferre tandis que Fernandel réendossait la soutane de Don Camillo et retroussait ses manches. Heureusement que l’OM recommence à gagner ses matchs, sinon il y aurait foule pour prier la bonne mère de Notre Dame de la Garde de protéger ses petits. Cette détonante modernisation de la définition du péché ne doit pas surprendre en cette décennie religieuse revendiquée par le Président Sarkozy dans son discours de Latran. Mais que pense Dieu de tout ça ?

@ 10 mars 2008

"Les hommes politiques ne sont pas des carpettes sur lesquelles on doit s’essuyer les pieds". Brice Hortefeux, 24 février 2008, BFM

Quelle différence y-a-t-il entre le salon de l’agriculture et la cérémonie des Césars ? Aucune, dans les deux cas, la graine et le mulet y sont aux premières loges. Le mulet quand un français moyen, de ceux que l’on trouvait dans la traversée de Paris de Claude Autant-Lara, insulte le Président le République française dans une forme grammaticale usitée seulement à l’école primaire : « tu m’salis, touche moi pas ! ». La graine de la discorde quand le représentant en chef de la nation se laisse aller à une réponse de cour d’école, mots grossiers en prime. Entre un Cavada à qui l’on reproche d’être resté silencieux lorsque le journaliste Yvan Stefanovitch, auteur de l’enquête Bertrand le Magnifique, dénonçait les pratiques de Delanoé pour s’attirer le vote juif et un Sarkozy agressif et insultant envers un quidam qui lui a manqué de respect, on peut se demander de quel bois sont faits nos hommes politiques contemporains. Le sacerdoce de la politique nécessite du sang-froid, des nerfs et de l’humour. Entre une population majoritairement et intrinsèquement inintelligente, des adversaires d’autant plus rapaces qu’ils sont aux abois et une presse cannibale incapable de conserver le sens de l’éthique, le chef de l’Etat ne doit pas, ne peut pas oublier qu’il incarne la France, au yeux de l’Histoire, de la communauté internationale et de ceux qui l’ont soutenu et le soutiennent encore. Se comporter comme la racaille pour lutter contre la racaille revient à cautionner les calomnies de la gauche. En déculpabilisant la droite, Nicolas Sarkozy en campagne a posé les jalons du renouveau de la culture libérale. En multipliant les comportements agressifs ou outranciers, Nicolas Sarkozy élu est en train de détruire les fondations du réveil français. Certes, on ne peut qu’acquiescer à la déclaration du ministre de l’immigration : "Les hommes politiques ne sont pas des carpettes sur lesquelles on doit s’essuyer les pieds". Il n’empêche que nous sommes bien loin des insultes et des noms d’oiseaux que s’échangeaient les parlementaires de la IIIe république avant de régler leurs différents sur le pré. On devrait d’ailleurs reconsidérer les duels : plutôt que de passer par des avocats aux tarifs exorbitants, un sabre dégainé dans la rosée de l’aube sur le Champ de Mars résoudrait plus radicalement et avec autrement de panache les petites contrariétés de nos dirigeants… Dans cette société orwellienne où toutes nos actions sont filmées et offertes aux regards des autres, on requerra de la part des personnalités publiques, toujours si précautionneuses avec leur image, une attention particulière lors de leurs sorties officielles. La critique n’est pas toujours constructive mais ce n’est pas une raison pour oublier sa place : pour chaque décision, il y a une conséquence. Dans un autre registre, Zidane a fait payer le prix fort à la France en finale de la coupe du monde pour l’avoir oublié. Ce n’est que du football, mais la leçon ne change pas : il faut toujours être exemplaire quand on représente la patrie. C’est un dû et un privilège. Il convient de ne pas l’oublier.

@ 27 février 2008

« Etre propriétaire de son logement fait-il voter à droite ? » Le Monde -17 février 2008

En ce mois de février, le mois de la purification en version latine (februarius mensis), la vie politique se déroule tranquillement dans notre village gaulois. L’oracle Patrick Devedjix lit dans le vol des canards sauvages et espère un « résultat convenable » de l’UMP aux municipales. La vestale Françoise de Panafix traite le chef des parisii Bertrand Delanoix de « tocard » ; celui-ci répond en moquant la « finesse » de son adversaire. L’ancien chef de Lutèce, Jean Tiberix, est renvoyé en correctionnelle pour une histoire de faux électeurs présumés. De son côté, notre héros, le petit guerrier gaulois Nicolas Sarkozyx, devenu grand chef de toute la Gaule, accompagné de son fidèle compagnon le livreur de projets François Fillonix, tente de sortir du piège dans lequel il est tombé à force de prendre trop de potion magique. Le grimoire du druide Attalix, pourtant riche en formules et sorts en tout genre, n’a pas résisté aux assauts des conducteur s de chars et repose désormais dans la grotte aux illusions. La belle bardesse Carla Brunix compose désormais ses odes pour le commandeur des croyants, qui a stigmatisé la « redoutable absence de Dieu » pour expliquer les drames du siècle précédent. Ainsi s’en va donc la vie et s’approchent les municipales au rythme des sondages. Pour tenter d’égayer le tout, il convient d’inventer des sujets de débats, si possible les plus sibyllins, ou encore les plus spécieux. Le sarcastique Proudhon avait naguère chanté que « La propriété, c’est le vol », formule lapidaire encensée par la gauche pendant des lustres. On pouvait donc en conclure que tous les propriétaires sont des voleurs. Interrogeons nous maintenant avec le très peu proudhonien quotidien Le Monde : «Etre propriétaire de son logement fait-il voter à droite ? ». On serait tenté de répondre par l’affirmative : puisque les propriétaires sont des voleurs et que les voleurs sont de droite, les propriétaires votent à droite. Syllogisme tellement imparable que même Le Figaro ne peut le contester ! Diable, le raisonnement perd de sa pertinence lorsque l’on sait que de nombreux électeurs de gauche sont propriétaires, rêvent de le devenir ou économisent pour accéder à la propriété. Proudhon désavoué ? Trêve de mauvais esprit. Cette question posée par Le Monde, vestige symbolique de la lutte des classes, ne suffit pas pour ouvrir une polémique dépassée. Elle souligne toutefois un phénomène authentique de cristallisation des électorats selon l’implantation locale, en zones périurbaine ou en centre-ville. Deux France qui ne se comprennent pas vraiment, se tolèrent dans des cadres précis et circonscrits et s’affrontent sur des enjeux de sociétés déterminants pour l’avenir. Voila pourquoi l’ouverture, cette alliance forcée et contre-nature voulue par le Président, laisse un goût aigre dans la bouche des électorats de chaque camp. Et il ne faut pas chercher plus loin une des principales raisons du désamour des français pour celui qu’une majorité a élu il y a déjà neuf mois. Le temps d’une gestation pour accoucher … de quoi ? On ne sait pas encore clairement à qui ou à quoi ressemble le nouveau né. Et c’est bien la le problème.

@20 février 2008

« Le téléphone portable est-il dangereux pour la santé ? » Le Figaro.fr et Le Parisien, 9 février 2008

Une étude fort sérieuse menée par des chercheurs de l’Université de Clermont-Ferrant montre qu’après une exposition de seulement dix minutes aux ondes électromagnétiques émises par un téléphone portable, le sujet secrète la molécule du stress. L’expérience n’a cependant eu lieu que sur des tomates, dont on connait la propension à rougir à la moindre contrariété. Certains affirment même que les SMS subissent un puissant effet boomerang et peuvent revenir à leur expéditeur non pas sur son portable, mais sur des sites de la presse d’information. Cet incident n’a toutefois pas été confirmé. Faut-il donc se méfier de ce gri-gri, adopté par 48 millions de français, indispensable compagnon de toutes les sorties ? Nous avons tous oublié à quoi ressemblait notre société sans Nokia, Sony Ericsson ou leur avatar Blackberry. Les adolescents ne pouvait utiliser l’excuse de la rapidité et de l’économie pour dissimuler leur pauvreté linguistique et grammaticale : « té chanmé : dsl mé c bon kan c cour». Il était inutile d’inventer sans arrêt des histoires pour ne pas dévoiler qui à sa femme, qui à son patron, que l’on ne se trouvait pas à l’endroit prévu. On n’entendait pas encore dans les bus ou dans les files d’attente des conversations privées aussi définitives que « oui, je prends du pain en rentrant » ou « t’es où, toi ? Moi, je suis chez le boucher. » Les rares humains à se balader dehors avec des objets en plastique figés dans l’oreille étaient les malentendants dotés d’une oreillette correctrice, et elles clignotaient rarement. Certains privilégiés arboraient leur valise Radiocom 2000 et tels des reporters au cœur du Sahara pouvaient contacter, en général de leur voiture sans peur du gendarme, le bureau, la femme ou la maitresse. Télévision, téléphonie mobile et internet, les trois Parques régénérées tissent les toiles invisibles du destin des humains. Leurs mailles nous emprisonnent. La dépendance à la communication, addiction moderne, réduit notre libre-arbitre sans avoir l’air d’y toucher : la pensée unique, plus exactement majoritaire et tyrannique, bien sur, et son corollaire, le ressenti émotionnel. Plus la technologie permet la découverte, l’échange, le partage, plus les hommes veulent contrôler ces bienfaits, appelant à la barre un irréfutable témoin, la transparence de l’information. Il faut tout dire, tout montrer, tout révéler. « Pas de zones d’ombre » devient « pas d’intimité », « pas de mensonge » devient «il faut exhiber ». Les nouveaux apôtres se nomment téléréalité, presses à scandales (on ne dit plus torchon), blog, et mêmes site internet de journaux réputés sérieux. Symbole d’une société décadente, cette nouvelle pornographie se nourrit des pires inclinations humaines, s’abreuvant aux âmes mal nées et neurasthéniques. Notre jeunesse en manque de défi se débat dans cet univers ourdi pour elle, ignorant qu’Atropos est au bout du fil, en attente de raccrocher au nez de chacun de nous. Alors en ce cas, oui vraiment, le portable est vraiment mortel.

@13 février 2008

«Nous avons perdu le soutien d'une partie de la gauche et du MoDem, mais nous sommes soutenus à 90 % par notre électorat», David Martinon, Le Figaro,

A un mois des municipales, l’Union de la Majorité Présidentielle ne fait pas plus la force que dans la Belgique désintégrée. Son précédent Président, devenu celui des Français, convole avec sa jeune et tendre, délaissant ses électeurs incrédules devant ce bonheur foudroyant. Trahis, ils se vengent en rabaissant sa côte de popularité au niveau de Jacques Chirac après la même durée d’exercice du pouvoir. Le message est clair, et les députés inquiets ne savent comment lui dire de ne pas tout mélanger. La gauche hollandaise boit du petit lait et laisse libre court à son humour qui lui a pourtant peu réussi avec les militants du PS. Une fois de plus, la droite avec toutes les cartes en main trouve le moyen de se mettre dans la pire des situations. Et pourtant, on croyait qu’avec celui-là, ce serait différent. A quoi a servi cette stratégie d’ouverture à tout crin si «nous avons perdu le soutien d'une partie de la gauche et du MoDem, mais [que] nous sommes soutenus à 90 % par notre électorat», comme le dit le porte-parole de l’Elysée. Certains Cassandres, oreilles ouvertes aux sirènes médiatiques, prédisent la perte de nombreuses grandes villes ; s’en réjouiraient même pour donner une leçon à un président trop négligent avec ses troupes. La politique du pire, une rengaine de la droite française, quelle pitié ! Du côté de l’Elysée, on préfère s’en prendre à la communication : il faut ex-pli-quer ! La pédagogie, c’est la solution. Pourquoi pas la réquisition d’une heure d’antenne par semaine sur France 2, tant qu’on y est ? France Télévision, c’est l’Etat, non, ou alors ça va le redevenir bientôt, sans publicité mais avec une belle dot de jeune remariée. C’est in, le remariage. Il manque d’ailleurs à la télévision une émission qui dévoile sans tabou les vies privées de nos dirigeants. Pourquoi réserver les vraies informations à Voici, Closer ou Gala ? Nous ne sommes pas aussi puritains que ces américains qui condamnent le réseau ABC à une amende de 1,4 millions de dollars pour avoir osé montrer une femme nue à une heure de grande écoute, n’est-ce pas ? Alors, aidons les avocats désolés de perdre une partie de leurs attributions au profit des notaires, et fabriquons une machine à procès télévisuelle : la vérité sur les vies privées des hommes et femmes politiques, avec reportages, photos, films, interviews des amants et des maitresses, des maris trompés et des femmes humiliées, mais aussi des histoires d’amours, des vies de familles épanouies. Voila ce qui nous intéresse, voici ce qui revigore notre confiance en nos élus : la téléréalité appliquée à la politique. Autre possibilité : cesser d’écouter le vacarme médiatique abrutissant en faisant la grève du village global afin de rendre leurs places aux élus locaux. Pourquoi se laisser imposer un ersatz de mondialisation à l’échelle nationale sans chercher des solutions au cœur de chacune de nos 36 782 communes ? Le travail quotidien des maires et des conseillers municipaux mérite amplement plus qu’une querelle itérative et pathétique entre les Messieurs-Dames de Paris. Souvenons nous de Frédéric Bastiat : « N’attendre de l’État que deux choses : liberté, sécurité. Et bien voir que l’on ne saurait, au risque de les perdre toutes deux, en demander une troisième ».
@ 06 février 2008

« Il faut faire de l’école un athlète et non plus un sumo » - Xavier Darcos, le 28/01/2008

Il y a 10 ans, Claude Allègre choisissait de comparer l’éducation publique à un mammouth qu’il convenait de dégraisser ; mais le mammouth a écrasé le ministre et a continué à brouter les vertes années de nos enfants. Malgré le réchauffement de la planète, l’éléphantidé ne semble pas suivre le chemin de ses ancêtres et s’est parfaitement adapté aux nouvelles conditions de son équilibre comme les 35 heures, les tailles basses avec string sorti pour les filles ou les caleçons apparents sur jean-sac de patates pour les garçons. Foin d’animalerie, Xavier Darcos, le ministre de l’éducation du gouvernement Fillon ne veut plus tromper énormément. Effet Bernard Laporte ou non, voici le temps du sport-roi. A moins que…Certains pourraient voir dans ce rejet du sumo une critique de Jacques Chirac, pourtant son mentor, et donc un signe d’allégeance à Nicolas Sarkozy. Chacun sait l’intérêt que porte notre ancien président à ce sport nippon, allant jusqu'à appeler son bichon maltais Sumo. Ce serait chercher la petite bête, ce qui, après un mammouth, risque d’être compliqué. Cette critique à l’encontre du sumo est d’ailleurs injuste. Tout d’abord, le sumo est un sport d’hommes, réservé aux hommes, ce qui est devenu très rare. Ensuite, les participants portent pour tout vêtement un mawashi, une bande de tissu serrée autour de la taille et de l’entrejambe, ce qui prouve leur courage. Enfin, les lutteurs ou rikishi sont sans doute un peu enveloppés, ils n’en sont pas moins des athlètes de haut niveau et suivent un régime réglementé avec réveil à 5 heures du matin et absorption du chanko nabe, une sorte de ragoût énergisant, matin, midi et soir. Trouvez-moi un écolier capable de cette astreinte et on en reparle. En réalité, il s’agit une fois de plus de faire le culte du corps, selon un modèle imposé par les magazines remplis page après page de créatures diaphanes et d’éphèbes improbables. Qu’est-ce qu’un athlète aujourd’hui ? Un sportif de haut niveau capable de se dépasser sans prendre de produits dopants ? Un gaillard aux muscles saillants recouverts d’huile, qui respire la force et fait fantasmer les donzelles et les gays ? Un combattant (du grec athlon « combat ») prêt à mourir pour sa patrie et à marcher pour qu’ « un sang impur abreuve nos sillons » ? Jules Ferry, père de l’école publique, laïque et gratuite, était également un partisan zélé de la conquête coloniale française. Il pensait sans doute que des bataillons de lettrés apporteraient une meilleure parole, et avec moins de fautes d’orthographe, aux sauvages du continent noir. Il ignorait en revanche que les athlètes les plus extraordinaires seraient d’origine africaine et se serviraient du sport comme un moyen d’attirer l’attention sur leurs conditions de vie aux Etats-Unis, comme le firent Tommie Smith et John Carlos aux Jeux Olympiques de Mexico. Les professeurs d’éducation physique apprécieront en tout cas cet hommage indirect rendu à leur travail, tandis que ceux de sumo se mettront en grève. Il est triste de penser que cela influera peu sur notre vie quotidienne. Il se peut aussi que les syndicats aient du mal à comprendre les souhaits du ministre et réclament des éclaircissements. Ceux-ci pourraient prendre la forme d’un voyage organisé pour les 800 000 enseignants à destination de Pékin en aout 2008 pour y suivre une formation accélérée en athlétisme. Une délégation pourrait même se rendre depuis la Chine jusqu’au Japon pour y constater de visu la faillite d’un système qui prend les sumos pour des Dieux alors que nous savons qu’ils ne sont même pas des athlètes. Au fait, combien de médailles avons-nous rapporté des derniers championnats du monde d’athlétisme ? Ah, deux ! On peut faire de l’école un athlète américain, please ?
@ 29 janvier 2008

« Le PS affirme avoir perdu près d'un quart de ses militants en un an » – le Monde, 19 janvier 2008

Parmi les légendes urbaines qui se propagent de bouches à oreilles rue de Solférino, il en est une plus terrifiante que les autres : la Disparition des adhérents. Rien à voir avec le lipogramme de Georges Pérec, le e final de socialiste n’a pas quitté sa place, pas plus que les autres voyelles. Non, cette disparition existe, François Hollande l’a vue. Pour lui, tout a commencé par une nuit sans lune, le long d'une route solitaire de campagne, alors qu'il cherchait un raccourci que jamais il ne trouva. Cela a commencé par un parti abandonné et par un homme devenu trop las pour continuer sa route. 218 000 encartés en mai 2007, entre 180 000 et 130 000 selon diverses sources en janvier 2008. Que sont ces adhérents devenus ? Ont-ils tous été kidnappés par des hommes du futur dans le but de les reformater, puis de les renvoyer en France le 9 mars 2008 pour créer un effet de surprise pour les municipales ? Ségolène les a-t-elle envoyés dans des camps militaires pour les préparer à une action commando afin de prendre le pouvoir sur le parti en avril ? La promo de l’adhésion à 20 euros était-elle limitée dans le temps et non renouvelable ? Ont-ils vraiment existé ? A moins que … L’ouverture. Tous les hommes politiques de gauche qui ont rejoint Sarkozy, il ne peut y avoir qu’une explication. Des otages. Sarko et son gouvernement ont pris en otage les 60 000 adhérents disparus et menacent de les exécuter à chaque fois qu’ils ont besoin d’une nouvelle caution de gauche. C’est la seule explication plausible, sinon pourquoi des hommes et des femmes engagés et convaincus par le socialisme iraient-ils rejoindre le camp ennemi, ce libéralisme honni ? Ce ne peut évidemment pas être l’appât du pouvoir, pas plus que celui du gain ni des privilèges. Ce ne sont pas non plus l’amour ni la haine, ni la faim qui les guident. Alors, pour que cette situation inique ne se reproduise jamais, les disparus de Solférino méritent que les médias se mobilisent. A l’aide, Hugo Chavez ! Circulez sur le net, pétitions ! Produisons un show télévisé, le Tontonthon, afin de récolter des fonds pour aider à la réapparition des introuvables. Tous ensembles, solidaires contre le capitalisme arrogant, infâme oppresseur des masses devenu aspirateur d’adhérents. Soit. Autre solution pour le PS : imaginer un programme de gouvernement cohérent et moderne, choisir sinon un leader crédible – à l’impossible nul n’est tenu – au moins une direction collégiale capable de fusionner les courants qui détruisent son harmonie, s’interroger sur les valeurs de gauche en 2008 quand les valeurs de droite les ringardisent et se débarrasser de Ségolène sans que cela passe pour du machisme archaïque. Pas simple. A ces conditions seulement, peut-être retrouveront-ils quelques disparus. J’en ai vu errer certains, hagards, les yeux dans le vide, avec à la main une photo de Mitterrand, demandant leur chemin à des âmes charitables. « S’il te plait, Monsieur, dessine moi une rose ».
@ 22 janvier 2008

dimanche 13 janvier 2008

LA FIN D'UN MONDE

«l'Iran est aujourd'hui le principal Etat à parrainer le terrorisme dans le monde». George W. Bush, le 13 janvier 2008.


Les Etats-Unis d’Amérique ne sont plus. La dernière zone non irradiée vient de subir une ultime attaque chimique, réduisant à néant toute vie humaine et animale. Le continent Nord-Américain est désormais officiellement constitué uniquement du Canada et de la République Islamique Inuit, pays protégés par le mur de neutrinos anti-radiation des dangers de la zone polluée. Comment a-t-on pu en arriver là en si peu de temps ? Il y a à peine un siècle, lors de la première attaque contre les Etats-Unis, le 11 septembre 2001, la communauté internationale s’était unie dans un élan de sympathie et de commisération à l’égard des victimes de la barbarie terroriste. Puis, après avoir regimbé sur la forme, le monde démocrate avait soutenu la lutte de George Bush contre le dictateur Saddam Hussein et la guerre en Irak. L’incapacité à imposer un gouvernement démocratiquement élu, l’enlisement des troupes pour protéger les compagnies pétrolières, comme le révéla le scandale de l’Irakgate de 2009, puis la débandade après les premières attaques iraniennes sur le territoire irakien la même année marquèrent le début de la fin. Tandis que l’Europe de l’Ouest succombait, incapable d’absorber les ressortissants des anciens pays de l’Est et les Africains toujours plus nombreux, l’Oncle Sam décidait d’anéantir l’Iran, désormais puissance nucléaire et leader spirituel des Républiques Islamiques du monde entier. La IIIe guerre mondiale de 2010 ne dura que 48 heures et réduisit l’humanité de 7 à 4 milliards, notamment par la destruction malencontreuse de la Chine, les 700 têtes nucléaires américaines déjà programmées n’ayant pas pu (voulu ?) changer de trajectoire. C’est en tout cas ce que déclara Bill Jones, pasteur et chef comptable chez HSBC à Austin, Texas, devenu dirigeant des Territoires de l’Ouest après l’anéantissement des terres situées à l’Est d’une ligne Houston-Chicago. Anéantissement au sens propre puisqu’il n’y avait absolument plus rien qu’un brouillard surplombant une désert de gaz. Les armes iraniennes étaient de tout premier ordre. Regroupés autour du pasteur Jones, les Adamistes, comme se nommaient les américains survivants, tous créationnistes et messianiques, lancèrent des attaques terroristes contre les musulmans. On se souvient du carnage d’Ispahan (plus de 700000 morts par bombes à fragmentation) en 2023, de la désintégration de la Mecque depuis la Station Spatiale Internationale (ISS) par le Superlaser Mark II en 2035 ou encore de la fonte de l’Arctique, qui cachait selon eux la nouvelle Mecque, en 2047. C’est ce dernier fait, on s’en souvient, qui a conduit la CAE, la Coalition Afro-européenne, à accepter de voter aux cotés des Républiques Islamiques Unies la suppression des Territoires de l’Ouest. Ainsi, en ce jour historique du 1er janvier 2099 disparait la nation qui après avoir incarnée la liberté en était devenue l’ennemi, déstabilisant la Terre, amputée en quelques années des deux-tiers de sa population. La première superpuissance de l’Histoire n’aura donc dominé la planète que cent cinquante ans, un dixième de seconde à l’échelle de la Terre qui a repris ses droits sur son ultime prédateur. Avec une température moyenne de 37 degré partout dans le monde, la continuelle montée des océans depuis la Grande Fonte et le détournement des courants marins, et la fin des énergies renouvelables, l’Humanité vit ses derniers instants. Qui la remplacera ? Personne ne le saura jamais…
@ 15 janvier 2008

LA TETE ET LES JAMBES

Les écrans de télévision "non seulement sont remplis de sarkozysme, mais ils dégoulinent de sarkozysme » - Laurent Fabius, Ripostes – 06/01/2008


La télévision, appareil de pouvoir au service du Président … Cette bonne vieille litanie des temps anciens a de quoi réjouir quand elle est resservie par l’ancien Premier ministre Laurent Fabius, lui qui a dès son plus jeune âge, entretenu des rapports simples et directs avec les dirigeants des chaînes publiques. Je ne parle pas de sa remarquable prestation équestre dans le cadre du jeu La tête et les jambes. Je fais plutôt référence à son cavalier « Parlons France », quart d’heure d’antenne mensuel imposée à la chaîne publique TF1 dès octobre 1984. Un numéro de voltige bien rodé pour expliquer sa politique : après tout, TF1, c’est l’Etat, et nous parlons du Premier ministre de la France, donc pourquoi ne pas utiliser la fréquence publique pour s’inviter dans les foyers. Il avait d’ailleurs peu de temps auparavant délivré son oukase à la Haute Autorité de l’audiovisuel (ancêtre du CSA), lui intimant l’ordre de remplacer le patron de la Deux, Pierre Desgraupes par Jean-Claude Héberlé, plus docile, niant ainsi l’indépendance de l’instance aux yeux de tous. Il n’est donc pas abusif d’écrire qu’en matière de contrôle du petit écran, Laurent Fabius possède un bon CV. Toutefois, vingt-cinq ans plus tard, regarder deux chaînes, mêmes les principales, et en tirer comme conclusion que « les écrans dégoulinent de sarkozysme », c’est un peu court. Aujourd’hui, la moitié de la population française reçoit gratuitement dix-huit chaînes et consomme essentiellement des films, des séries et du sport. Les plus jeunes ne regardent presque jamais les informations, sauf les infos sur les stars académiciens, le temps qu’il fera demain (ça, ça ne change pas) et les clips (si, il y a des infos écrites sur les chanteurs en dessous des images). Qu’il est loin le temps où Alain Jérôme recevait dans les Dossiers de l’Ecran d’éminents spécialistes ou témoins pour un débat enfumé mais rarement fumeux. On ne mesurait pas l’audience, il n’y avait que trois chaînes. Tout le monde affirmait admirer Apostrophes, illustre autel de la littérature, avant que Médiamétrie en 1987 ne lui assénât un coup bas en révélant la vérité cachée : ils l’aimaient, mais ne la regardaient plus, s’en détournaient pour une petite aguicheuse, plus pimpante. La garce ! La Une refaite et privée en plus ! On ne comptait pas vraiment le temps que chaque politique passait à l’antenne, il n’y avait pas cette équité scolaire absurde censée garantir un équilibre entre l’opposition et le gouvernement, érigée en table de loi pour protéger nos Libertés, comme une ceinture de chasteté protégeait la femme d’un seigneur parti guerroyer. Sarkozy est omniprésent dans les médias ? So what ? Il se met en scène comme dans un reality show et les chasseurs d’images en redemandent. Acteur politique au bras d’un mannequin, il fait de l’audience, alors on le voit. Vous avez du temps de cerveau disponible pour le regarder, profitez-en. Avouez, Messieurs les contempteurs, que vous êtes jaloux d’un tel succès. On sait que le pouvoir attire et excite certaines femmes, et la petite histoire des Républiques Françaises regorge de conquêtes féminines par nos Présidents et chefs de gouvernements. La différence, c’est qu’il fallait les cacher : le sexe et l’amour appartenaient à la sphère privée, et souvent il y avait une légitime à la maison. Avec Carla Bruni, Nicolas Sarkozy explose encore une fois les coutumes : il affiche sa belle chanteuse, sa vie privée, il vit dans son époque, il est un people (on les reconnait aux lunettes de soleil) et en plus il dirige le pays. Difficile de faire mieux ! Ah si, il aurait pu aussi être sélectionneur de l’Equipe de France de foot, mais c’était déjà pris.
@ 08 janvier 2008

GROSSE CHALEUR

« Il y avait les économies de marché, les économies dirigées, il reste à inventer une économie écologique. » Jean-Louis Borloo, Libération, 15/12/2007


Khadafi a quitté Paris, ayant acheté une respectabilité pour 10 milliards d’euros, selon les chiffres officiellement annoncés, et pourtant très contestés. Drôle de procès encore une fois fait à Sarkozy par ses adversaires. Ils ouvrent à nouveau la porte sur leur leitmotiv de campagne : il est dangereux, il est n’est que pragmatisme et communication, il n’en fait qu’à sa tête. Impossible à ce jour de connaître la vérité sur ces contrats juteux, mais on ne peut que constater une fois encore ce qui caractérise la politique sarkozienne : le courage. Il avait plus à perdre qu’à gagner devant l’opinion en recevant le Guide libyen, et si Khadafi n’est pas Hitler, Sarkozy n’est pas Daladier. Pourtant, la bravoure n’est pas suffisante quand elle s’acoquine à la realpolitik. Il lui manque le sel de la Terre, le respect de ses convictions les plus profondes, l’engagement sur les valeurs qui définissent une communauté, ici la France. Et à jouer avec le feu, il n’est pas rare qu’on se brule. Souhaitons que cette aigreur ne soit que passagère. Jean-Louis Borloo avait lui rendez-vous avec l’Histoire à Bali. C’est en tout cas ce qu’il ressent, comme beaucoup de participants à ce congrès international organisé par l’ONU, chargé de trouver un successeur au protocole de Tokyo de 1997. L’objectif est connu : lutter contre le réchauffement climatique pour éviter à terme à la disparition de l’humanité. Les Américains, champions hollywoodiens, jouent le rôle des méchants depuis dix ans. Heureusement, à la fin, ils redeviennent gentils et acceptent de reconnaître qu’il fait trop chaud…Les méchants dans l’épisode 2, ce sont les Chinois, et tous les pays en développement. Quelle solution ? Bombe atomique, torture, invasion, alliance avec les intégristes musulmans ? Humm, avec cette grève des auteurs, difficile de trouver une histoire qui marche. Heureusement, c’est un scénario catastrophe, d’où blockbuster et recettes en millions de dollars. Attention au marketing, le bouche à oreille détermine aussi le succès. Hein ? Quoi ? Le réchauffement est réel, ce n’est pas une fiction ? « Il y avait les économies de marché, les économies dirigées, il reste à inventer une économie écologique. » Belle réplique de notre ministre de l’écologie. Alors, qui s’y colle ? les pétroliers, qui organisent la pénurie pour faire monter les prix ; l’OCDE, qui pourrait perdre tous les avantages matériels conquis au fil du capitalisme triomphant du XXe siècle ; les nouveaux géants (Chine, Inde, Brésil) responsables de la survie de notre futur ; ou l’Afrique, berceau de l’Humanité, et qui pourrait en être le tombeau ? La Révolution industrielle engagée au début du XIXe siècle n’a jamais si bien porté son nom, car voici qu’arrive son premier avatar : la Terreur. La liberté incarnée par les voitures, les avions, la société de consommation et ses cohortes d’usines à rêves rappelle qu’elle a un prix et qu’il est temps de payer la facture si on ne veut pas revenir à l’époque de la voiture à bras, de la pirogue et du chauffage au bois. De toute façon, on n’a plus le droit de couper les arbres. Et à quoi serviraient tous les beaux radars annoncés si nos routes étaient désertées…En plantant sa tente dans les jardins de l’hôtel de Marigny, Khadafi nous a montré l’avenir. Aie !

I LOVE AMERICA

« My plan to secure the border : two words. Chuck. Norris. »- Mike Huckabee, ancien gouverneur de l’Arkansas, candidat à l’investiture républicaine pour les présidentielles de 2008. Novembre 2007.
La campagne américaine qui commence promet d’être autrement plus divertissante que la notre. Le système s’y prête, avec une route semée d’embûches pour les candidats aux primaires de chaque parti. Ces derniers s’entourent de célébrités – chanteurs, comédiens, vedettes de télévision – dans le but de créer des mouvements de sympathie en leur faveur. Le premier et déjà plus beau « coup » de cette fin d’année est à mettre à l’actif de Barack Obama, candidat démocrate, qui vient de trouver en Oprah Winfrey une marraine exceptionnelle. Cette présentatrice et productrice du talkshow le plus vendu au monde, The Oprah Winfrey Show, (117 pays mais pas la France…) est une superstar, milliardaire et noire, classée par Forbes la personnalité la plus influente au monde en 2007. Son engagement pour Obama, c’est un peu comme si PPDA avait appelé à voter pour François Bayrou, mais à la puissance 1000. D’autres candidats font appel à des chanteurs comme Paul Simon ou Jackson Brown, aussi célèbre outre-atlantique qu’inconnu dans l’hexagone. Mais la palme du meilleur soutien revient à Mike Huckabee, pour son alliance avec Chuck Norris. Ce comédien est célèbre pour ses films d’action et de karaté, mais également pour son rôle dans la série Walker, Texas Ranger, dans laquelle il incarne un pur texan avec son stetson et ses santiags, prônant les valeurs traditionnelles de l’oncle Sam. « My plan to secure the border : two words. Chuck. Norris. » Fusionnant fiction et réalité, Mike Huckabee, candidat républicain, propose dans un spot surréaliste sa vision d’une Amérique intransigeante, prête à se battre pour verrouiller ses frontières, avec Chuck Norris à ses côtés. Il ne s’agit pas d’une parodie : Huckabee est homophobe, créationniste, se voit en leader chrétien et rencontre un succès croissant dans les intentions de vote en Iowa, premier Etat à se prononcer dès janvier. Son aspect débonnaire, son faciès sorti d’une sitcom de ABC, des effets spéciaux comme on n’en fait plus depuis 1971, tout pourrait porter à croire à un canular et l’observateur français a du mal à garder son sérieux en découvrant ces images. Et l’on se prend à rêver : mais pourquoi personne n’y a-t-il pensé en avril dernier ? Imaginez Sarko. « Mon plan pour la France. Deux mots : Christian. Clavier. Deux autres : Jean. Réno. Et plein d’autres encore, Mireille Mathieu, Johnny, Faudel, plein je vous dis. » Ou Ségolène. « Mon plan pour l’ordre juste. Deux mots : Philippe. Torreton. Qui ? Ben, Torreton, le comédien. Il a joué dans quel film ? Mais tu sais, l’ancien chéri de Claire Chazal. Ah, oui, je vois. Il était dans les Rois maudits de José Dayan sur TF1.Voila ! » - François Bayrou : « mon plan pour la Vie République en deux mots : Patrick. Sébastien. Pas mieux. » Difficile de résister à de tels tourbillons de lumières et seule une législation archaïque si gauloise sur l’art et la manière de mettre en avant les supporters politiques explique cette déficience de spots éclairés sur nos antennes…Revenons à Chuck. Il existe un site intitulé Chuck Norris facts, qui énonce des faits exaltant la puissance et la virilité de l’acteur, et dépeint ses valeurs et ses méthodes. Un remarquable complément à la campagne de Huckabee , qui prouve si besoin était la capacité des Américains à rire d’eux-mêmes. Mon préféré : « Quand Chuck Norris utilise Windows, il ne plante pas. » Après huit ans d’incomparables Bushisms, les gaffes de George W., nous attendons avec impatience un candidat prêt à relever le défi. Ready, Chuck and Mike ?

TANT QU’ON A LA SANTE…

« La priorité de 2008 sera la santé des Français. » Nicolas Sarkozy, le 1er décembre 2007
Les jours, les semaines et les mois se suivent et se ressemblent pitoyablement selon des cycles prédéterminés. Après la phase optimiste des cent jours, voici la période pessimiste avec l’hiver des désillusions. Le peuple gronde et se défie de son maître, il veut de la brioche et de l’essence moins chère pour prendre la route loin de la ville chaque fin de semaine et revenir le dimanche soir coincé comme ses semblables dans les bouchons. Las, la méthode Sarkozy commence à prendre l’eau dans l’opinion publique. L’usage alterné du bâton et de la carotte fonctionne sur un âne, sur les Américains (à l’époque de Théodore Roosevelt), assez peu sur les Français, qui les confondent souvent. A ménager la chèvre et chou, on laisse son public mi-figue mi-raisin, qui trouve que tout cela est bonnet blanc et blanc bonnet. La richesse de la langue de Céline ne peut justifier une politique de compromis qui commence à lasser à droite et prête le flanc à …bon d’accord, il n’y a toujours personne à gauche. Modem, vous avez dit Bayrou ? Il n’empêche, les déclarations récentes du chef de l’Etat déroutent : je suis extrêmement curieux de connaître le texte de loi qui « va supprimer dès le début de 2008 les cautions et réduire à un mois les dépôts de garantie », comme l’a exprimé François Fillon. Est-ce donc l’Etat qui va se porter caution et rembourser le propriétaire qui ne touche plus ses loyers ? Est-ce donc l’Etat qui va rembourser le propriétaire dont le logement aura été saccagé par un locataire peu soigneux ? Conséquence : le nombre de taxes sur les logements vacants va fortement augmenter l’année prochaine et le nombre de logements accessibles va diminuer, engendrant une hausse des loyers puisqu’il y aura pénurie de location. Bah, tant qu’on a la santé ! Il restera bien quelques tentes à monter le long d’un canal, et quelques intermittents pour faire entendre leur voix. Les vrais SDF, non, ce n’est pas très intéressant, ils sont à la marge, souvent Polonais ou Roumain, enfin pas comme nous. Heureusement qu’on va être bien soigné, nous autres français. En 2007, auront été réglés : le pouvoir d’achat, les universités, les régimes spéciaux de retraite, les RTT, Jacques Chirac, la réforme de la justice, l’audiovisuel extérieur, le téléchargement illégal, la qualification des Bleus pour l’Euro, les radars sur les routes. Pas mal ! En 2008, on s’occupe de la santé. Le déficit public, on verra en 2009. Donc fini la cigarette, fini l’alcool et le vin, tout le monde à vélo ou au jogging, le sexe sera contrôlé régulièrement avec préservatif obligatoire pour les couples non mariés (dérogation possible pour les pacsés si caution parentale). Un peu d’investissement dans la recherche contre le sida et le crabe. Dans les cantines des entreprises, suppression des frites et des pizzas trop grasses, restriction à un dessert par semaine, remplacement du café par un ersatz chaud et aromatisé. Fruits de rigueur, de préférence cuits et accessoirement sapides. Des incitations fiscales à l’embauche de salariés en pleine santé seront mises en places rapidement et des déductions d’impôts en faveur des citoyens qui auront validé leur parcours de santé annuel inciteront les plus ardents à faire toujours mieux. Un barème étatique sera affiché dans les écoles, les administrations, les entreprises et toutes les mairies, qui permettra à chacun de mesurer ses efforts et ainsi de se donner les moyens d’obtenir les avantages promis. A défaut de finances saines, les Français auront des corps sains, que nous envieront nos voisins, nos alliés et nos ennemis. Et n’oublions jamais que le travail, c’est la santé.