dimanche 22 juin 2008

LE TRAVAIL REDEMPTEUR

Le candidat Sarkozy l’avait annoncé, il allait remettre la France au travail. Après quelques errements, nous voici repartis dans le droit chemin. La réforme des 35 heures, ciment de la droite, va-t-elle enfin voir le jour ? Début juin, les ministres de l’Emploi des 27 pays de l’Union Européenne ont fixé les règles afin de faciliter le travail à la carte : mieux encadré selon Xavier Bertrand, le temps de travail pourrait, sur la base du volontariat, atteindre les 60 heures. Au Parlement de prendre ses responsabilités pour accroître cette liberté en votant à l’unanimité en faveur de cette mesure. Syndicats et gauche tentent de contrecarrer cette indispensable adaptation au monde contemporain en se plaçant sur le terrain du social, du sens de l’Histoire et de la protection de la santé : régression voire semi-esclavage, selon une socialiste espagnole, quand l’époque est à la vie de famille. Cette réaction illustre admirablement la fracture principale entre la gauche et la droite, une frontière protégée par des convictions plus infranchissables que des barbelés. La caricature de l’autre s’impose comme argument incontestable, renvoyant aux pires heures du capitalisme : les patrons exploitent, les travailleurs subissent. Les privilégiés grossissent, les salariés dépérissent. A traits à peine moins grossiers, nos syndicats nous expliquent la fin du modèle social européen. Le ridicule ne tue plus, tant mieux. En France, la mère des 35 heures, Martine Aubry, renaît icône de ce monde plus humain, amassant au passage des points pour la conquête du parti socialiste. Effet d’aubaine inespéré pour l’ancien numéro 2 du gouvernement Jospin, qui devient fort logiquement une alternative crédible au poste de premier secrétaire du PS. On peut se réjouir de la bonne santé de notre démocratie quand la diversité des opinions est aussi tranchée. On peut également s’étonner d’une vision aussi tronquée de la réalité sociale, 20 ans après la chute du mur de Berlin et l’effondrement du bloc de l’Est. La fin de notre monde s’approche à la vitesse de la lumière : avec la surpopulation et l’épuisement des ressources naturelles utiles et connues, sonne à notre porte le tocsin de la famine, héraut des guerres, et source des flux migratoires accrus du sud vers le nord. Cette situation terrifiante suggère deux attitudes : profiter maintenant de nos richesses, avec nos proches, en refusant un système qui a échoué à fabriquer un avenir radieux pour tous. C’est un renoncement au futur, mais aussi un rejet du passé, désigné coupable de notre présent chaotique. On peut également croire dans la vertu du travail, sans être dupe du système, mais en se reposant sur la force du progrès. Les vieux adages, outre qu’ils nous replongent dans de mythiques âges d’or, recèlent une puissance évocatrice bien utile quand le découragement survient. Si tous les gars du monde voulaient se donner la main…me revient en tête, et malgré sa naïveté apparente, cet espoir dans l’humain, enterré par les cinquante premières années du XXe siècle, ne doit jamais nous quitter. Nous sommes une génération privilégiée, dont les aïeux ont payé le prix du sang pour nous permettre de vivre libre. Nous sommes leurs débiteurs, et cette dette se remboursera en construisant pour nos descendants un monde dont ils seraient fiers, fondé sur les valeurs du travail, de la liberté et de la fraternité.

@ 15/06/08

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